© Midi Libre / Barbarit Caroline
Difficile de le suivre à travers la ville. Il connaît beaucoup de monde, d’endroits. S’arrête à chaque coin de rue pour taper la bise. Avec sa gueule d’ange et son sourire charmeur, on ne soupçonnerait pas qu’il se cache derrière Othman De Poltorasky un businessman à la tête de Hot event’s, société montpelliéraine créée en 2015 spécialisée dans l’événementiel. À 29 ans à peine.
Mais la route a été longue. Débutée en 1986 au fin fond du Maroc. « Un trou perdu. Un peu le Larzac d’ici », se moque-t-il gentiment. Après une scolarité rangée, ce fils d’homme d’affaires franco-russe et de mère marocaine travaillant dans l’Éducation nationale réalise que sa vie n’est pas ici.
Il quitte son Maroc natal pour le Clapas en 2003
Sa première claque, Othman la prend à 15 ans, quand la parabole arrive enfin sur le toit de la maison familiale. « J’en ai pris plein les yeux. Je découvrais le monde occidental, regardais en boucle les reportages de M6 et les émissions de téléréalité. Sans parler d’internet… » Il rêve alors d’ailleurs, de mieux, de libertés intellectuelle et sexuelle, lui qui a compris qu’il préférait les garçons.
En 2003, celui qui se lève tous les matins « pour réaliser (sa) vie » met quelques effets dans sa valise, direction Montpellier. Après quelques mois en maths sup à Joffre, ce sont les bancs de la fac des sciences qui l’accueillent, section chimie. Othman se sent comme un oiseau libéré après dix-sept années passées en cage. Mais ouvrir la porte ne suffit pas et voler de ses propres ailes n’est pas si aisé.
« J’étais perdu, je me sentais déraciné »
Les deux premières années, il les passe entre les murs de sa chambre d’étudiant. Pétri de questionnements. « Beaucoup auraient du mal à le croire aujourd’hui. Pourtant, j’étais perdu, je me sentais déraciné. Je me suis accroché chaque jour un peu plus », raconte-t-il.
C’est à ce moment-là, à 20 ans, que le monde de la nuit lui ouvre les portes quand sa famille et des proches les lui referment. Cet hyperactif de la vie enchaîne les défilés et passe derrière le bar du Maxximum, boîte gay friendly de Palavas aujourd’hui fermée.
Il est illico débauché par la Villa rouge version Teissier – l’une des grandes références du clubbing gay dans ces années-là – pour gérer le Cat’s club, l’espace dédié à cette clientèle. Une révélation pour le jeune diplômé en gestion de parapharmacies, qui assure aussi son job une fois le soleil levé.
Directeur artistique des soirées gays montpelliéraines
Othman De Poltorasky devient directeur artistique des soirées gays montpelliéraines « The Link ». Il encadre le personnel, assure les performances, fait le show. L’aventure durera deux ans. Mais l’envie de se lancer seul le titille. Le jeune directeur artistique crée alors « La Radieuse » à l’automne 2014. Une before qui allie cultures visuelles (expos), musicales (DJ’s de renom) et performances, généralement assurées par Julien De Bomerani, son acolyte depuis plus de sept ans.
Une fois par an, il met un point d’honneur à ce qu’une partie des bénéfices de « La Radieuse » soit reversée à une œuvre caritative. Comme ce fut le cas lors de la seule soirée officielle de la dernière Gay pride – que la LGBT lui a demandé d’organiser -, dont la moitié de la recette est allée grossir les caisses de Fierté Montpellier pride.
Aujourd’hui, Othman De Poltorasky se consacre à sa prochaine Flawless (littéralement « Sans défaut ») – des soirées gay et friendly en partenariat avec l’Addict klub de Saint-Jean-de-Védas – du 31 décembre. Il partira ensuite assurer la direction artistique visuelle de l’European’s show pride à Tignes, du 18 au 26 mars. Là aussi, l’une de ses grandes fiertés. Mais la plus importante reste d’avoir enfin obtenu, après plus de quinze ans, la reconnaissance de ses parents.